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jeudi 14 février 2008

La faute de gestion en matière fiscale

Par Rachid TMAR ; Expert Comptable et Associé, PricewaterhouseCoopers

Le comportement du dirigeant qui manifeste une intention délibérée de mal agir et de violer la légalité, le règlement et même les dispositions contractuelles, a été qualifié, d'une façon large, par la jurisprudence ainsi que par la doctrine, comme comportement fautif, lorsqu'il s'inscrit dans le cadre de la gestion ou de l'administration d'une société; d'où l'expression de « Faute de gestion »

Cette interprétation large de la notion, a fait que le dirigeant a commis une faute de gestion lorsqu'il ne respecte pas l'objet social indiqué dans les statuts, qui détermine en fait son champ d'activité et ses pouvoirs, contribuant ainsi à l'augmentation indûment du passif social, ou ne respecte pas les dispositions d'ordre pénal, les dispositions du droit des sociétés notamment celles des droits comptable et fiscal,
Le dirigeant social étant le représentant légal de l'entreprise, a le devoir d'administrer celle ci en bon père de famille. Ainsi, il aurait faillit à son devoir, en matière fiscale, notamment, en cas de :
• Défaut de tenue d'une comptabilité régulière
• Défaut ou insuffisance de déclarations fiscales
• Non diligence en matière de contrôle et de contentieux fiscal
1/ Défaut de tenue d'une comptabilité régulière
L'obligation d'une tenue de comptabilité a été précisée par la loi fiscale en renvoyant le dirigeant aux lois comptables, notamment, en matière respect des dispositions du système comptable en matière, de tenue des livres légaux, d'enregistrement des écritures comptables, de présentation des états financiers et de dépôt de logiciels informatiques, le cas échéant
Les livres légaux, à savoir le livre journal, le livre d'inventaire, le grand livre et la balance devraient être mis à jour. Les deux premiers sont obligatoirement cotés et paraphés avant leur utilisation pour vérifier, justement, le respect de cette mise à jour.
Le non respect de ces règles de tenue comptable, constitue un motif de rejet par l'administration fiscale et donc une faute de gestion qui engendre des sanctions pénales pécuniaires (A 97). Par ailleurs, les livres légaux reçoivent d'écritures comptables qui devraient être appuyées par des documents probants
Il ressort du code des procédures que le défaut de tenue, de communication ou de conservation des documents comptables, l'émission ou d'utilisation de factures fictive, en vue d'éluder le paiement de l'impôt (A. 94) et l'émission de factures non numérotées ou dans une séquence irrégulière ou interrompue (A 96), constituent des infractions à la loi fiscale punissable pénalement ;
Il va sans dire que les Etats financiers à joindre à la déclaration annuelle devraient être réguliers et sincères et refléter l'image fidèle de la situation financière de l'Entreprise.
Le gestionnaire qui tient une comptabilité double ou utilise des registres ou documents falsifiés, qui simule des situations juridiques, qui produit des documents falsifiés ou qui dissimule la véritable nature juridique d'un acte ou d'une convention dans le but de bénéficier d'avantages fiscaux, de minorer l'impôt exigible ou de sa restitution ou qui transmet les biens de l'entreprise à autrui pour ne pas payer la dette fiscale, commet une faute de gestion caractérisée, sanctionnée pénalement. La peine est corporelle et pécuniaire (A 98,101).
2/ Défaut ou insuffisance des déclarations fiscales
Le gestionnaire commet aussi une faute de gestion lorsqu'il expose l'entreprise à des pénalités, des amendes et dans certains cas à des sanctions pécuniaires à son encontre, lorsqu'il ne dépose, pas les déclarations fiscale requises ou les dépose avec retard ou enfin déclare ce qu'il faut déclarer d'une façon insuffisante.

En effet, le code des droits et procédures fiscaux (CDPF) édite dans son article 2 que «l'accomplissement du devoir fiscal suppose la déclaration spontanée de l'impôt, dans les délais impartis, et le respect des autres obligations prescrites. Tout retard dans le dépôt des déclarations constitue une faute qui implique des pénalités de retard en plus du principal (A 89). De même, le dirigeant qui refuse de délivrer un certificat de retenue à la source ou qui n'opère pas cette retenue supporte une amende égale au même montant
Il convient de rappeler qu'il n'est pas demandé au gestionnaire de déclarer uniquement mais aussi de le faire d'une façon exhaustive.
Ainsi, la non déclaration et payement de la TVA ou le DC collectés, la retenue à la source opérée, et son non payement depuis 6 mois, constitue une faute de gestion engageant la responsabilité pénale corporelle du gestionnaire (A 92)
Toute insuffisance de déclaration, volontaire ou par omission est aux yeux de l'administration un acte fautif engendrant le payement de pénalités de retard (A 91)
Il est à préciser que pour certaines fautes pénales, la charge de la preuve incombe à l'administration (A 108), à savoir celles se rapportant, au non respect des règles de facturation, à la tenue d'une double comptabilité ou utilisation de documents falsifiés, aux complices des auteurs de la compta double et de l'utilisation des documents faux, à la simulation, falsification, détournement de biens sociaux et majoration de crédit de TVA, DC, minoration du CA et restitution indue de la taxe
3/ Non diligence en matière de contentieux fiscal
Le gestionnaire commet encore une faute de gestion lorsqu'il ne se montre pas diligent en matière de contentieux fiscal, notamment par la non collaboration avec l'administration fiscale en cas de contrôle,
S'agissant du non suivi convenable des procédures contentieuses, le CDPF dispose dans son article 97 que le refus de communication à l'administration fiscale des documents comptables, constitue une faute pénale commise par le gestionnaire.
La faute est aussi consommée en cas de destruction de ces documents avant terme, c'est à dire avant la fin des années de prescription.
Il convient de préciser que l'acte anormal de gestion est couramment évoqué comme cause de chefs de redressement, pour requalifier certains actes du gestionnaire, tel que la non facturation d'intérêt au profit de la société, la constatation des dépenses somptuaires…
De même, le non suivi convenable des affaires contentieuses par le gestionnaire est préjudiciable pour l'entreprise.
En effet, par sa négligence, tel que la non observation des règles de forclusion en matière de réponse, d'appel et de pourvoi, une instruction insuffisante du dossier, le non payement dans les délais des avances sur taxation d'office, le dirigeant occasionne un passif à l'entreprise dont il à la charge. Il doit ainsi répondre des conséquences dommageables de ses actes vis-à-vis de ses associés.
Conclusion
La faute de gestion peut avoir pour origine une violation de la règle fiscale plus ou moins marquée. le comportement fautif est forcément marqué par un agissement, volontaire ou non, contraire à l'intérêt social et parfois à l'ordre public. Etant le représentant légal de l'entreprise, le Dirigeant assume, en conséquence, personnellement la responsabilité civile et pénale de ses agissements. S'agissant d'une lourde charge qui porte sur ses épaules, il gagne à se faire bien assisté.

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